Testé pour vous, le Good Night Train Bruxelles-Berlin

Christiane Goor,
09-06-2023
Depuis le 25 mai dernier un train de nuit de la start-up European Sleeper relie 3 fois par semaine Bruxelles à Berlin, une belle alternative écoresponsable pour tous ceux qui veulent réduire l’empreinte écologique de leur voyage. Une autre question demeure : est-ce vraiment financièrement intéressant ? Nous avons choisi de nous offrir un aller-retour sur ce train-couchettes avec un départ le mercredi 31 mai et un retour 4 jours plus tard, le dimanche 4 juin. Nos impressions !

Le voyage aller vers Berlin

3 heures avant le départ un sms avertissait les passagers que l’arrivée prévue à la Hauptbahnhof, soit la gare centrale de Berlin, était déplacée à la Gesundbrunnen, une gare plus excentrée au nord de la ville. Un demi-mal car la capitale allemande est très bien desservie par un réseau de transports complet entre bus, trams (le S) et métro (leU).

A la garde du Midi – Bruxelles © Charles Mahaux

On est nombreux à avoir choisi par sécurité de se présenter à la gare du Midi avec ¾ d’heure d’avance. Bonne idée car le train qui appartient à une entreprise privée n’était pas annoncé sur les écrans du hall. Le responsable des informations qui a pu être trouvé était désolé de ce couac du « système qui n’avait pas encore été adapté » donc c’est dans son talkie-walkie qu’il a reçu et partagé la nouvelle de l’arrivée de notre train sur le quai 5. On peut espérer que ce souci est résolu depuis !

Il y avait pas mal d’excitation dans l’air entre les nombreux passagers sur le quai qui n’imaginaient pas un train assez retro dans son look où les placards blancs European Sleeper apparaissent bien discrets sur le flanc des voitures. Chacun s’empresse de trouver son wagon et ensuite son compartiment, on éclate de rire quand on se croise avec les valises et sacs à dos dans le couloir étroit. Les numéros des couchettes sont clairement indiqués sur la porte vitrée du compartiment. Les deux couchettes supérieures sont ouvertes et on y trouve les 4 oreillers, couvertures et draps pour installer plus tard les 4 couchettes réservées dans ce compartiment. On peut choisir de dormir sur les couchettes à hauteur moyenne en relevant les dossiers des divans du bas derrière lesquels se trouve une échelle à fixer pour atteindre plus facilement les couchettes supérieures.

Un retardataire © Charles Mahaux

Un coup de sifflet, le train part à l’heure et déjà on est ravi de pouvoir baisser les vitres du compartiment comme certaines du couloir, ce qui permet de mieux découvrir encore le paysage qui déroule devant nos yeux et d’apprécier cet air-co naturel ! Un jeune steward vient vérifier que nous sommes bien installés et nous briefer sur l’organisation du voyage. Il n’y a pas de bar-restaurant sur cette ligne mais le steward tient à notre disposition quelques boissons et des snacks. Il nous apporte déjà nos petits déjeuners dans des petits sacs en papier, « rien de très gastronomique » avoue-t-il et il prend la commande de nos souhaits de boisson pour le lendemain matin : café, thé ou jus d’orange.

Un petit tour aux toilettes et aux lavabos disponibles dans chaque wagon me confirme bien ce côté vintage de notre train. De quoi me rappeler mes voyages en France quand j’étais étudiante. D’autres se souviennent de leurs voyages en train durant un mois en Europe avec la carte inter-rail qui leur a souvent permis d’économiser des nuits d’hôtels en choisissant le train de nuit. En effet le plus gros obstacle rencontré par la jeune entreprise European Sleeper a été de trouver du matériel roulant adéquat car ce service de train-couchette a disparu depuis l’arrivée des avions low-cost. Une rame de 10 voitures est actuellement possible pour opérer cette liaison trois fois par semaine mais il n’y a pas encore de voiture-restaurant.

La cabine-couchette © Charles Mahaux

Nous avions prévu nos sandwiches, ce n’était pas le cas de notre co-voyageur qui a choisi de jeûner, se contentant de la bouteille d’eau offerte par le steward à chaque passager. Un dernier co-voyageur est monté à Amsterdam, nous l’avons attendu pour organiser nos literies. Le partage obligé avec d’autres passagers d’un même compartiment offre la possibilité de rencontrer des personnes avec qui on ne parlerait sans doute jamais. Ici, il faut bien s’organiser car l’espace est étroit mais tout se passe bien et on s’interroge en riant sur comment se glisser dans la housse de couette sans couette qui nous sert de draps. Prévue pour une personne elles ne sont pas très larges et l’ouverture n’est pas très grande non plus. Pas évident pour une personne plus forte ou moins mobile. Nous voilà installés sur nos banquettes un peu dures, tentures tirées et attentifs aux bruits du roulis qui s’interrompra de temps à autre durant la nuit lorsque le train devra s’arrêter pour permettre sans doute le passage d’autres convois.

Cabine de luxe © European Sleeper

Pour ma part, je me réveille tôt, comme d’habitude, ce qui me permet de me rafraîchir succinctement dans les espaces lavabos particulièrement étroits également et de quitter mon pyjama. Je resterai un moment dans le couloir à contempler les paysages de la campagne allemande qui s’éveille sous un soleil qui sera sans doute lumineux toute la journée.

Retour en cabine, le chef du train annonce notre arrivée dans une heure, il est temps de replier les couchettes, de découvrir notre petit déjeuner distribué la veille. De fait, ce n’est pas grand-chose : un croissant emballé dans son plastique, un petit ravier de margarine, un autre de confiture et un dernier de fromage pour garnir 4 mini-crackers. On se regarde tous un peu dépités mais bien décidés à commencer la journée à Berlin par un autre petit-déjeuner. Par contre nous sommes tous ravis de la formule d’autant que nous étions en tenue sportive, ayant choisi cette expérience de voyage pour sa moindre empreinte carbone, mais aussi pour cette impression de gagner du temps en économisant une nuit d’hôtel. Il n’est pas prouvé que l’on arrive à Berlin frais et dispos mais après un second petit déjeuner qui recharge les batteries, nous avons consacré toute notre première journée à arpenter la ville et il est vrai que nous nous sommes écroulés à 21h dans notre lit après une douche bien agréable.

Les couloirs © Charles Mahaux

Le voyage retour vers Bruxelles

Il y a encore eu un contretemps mais cette fois nous avons été prévenus deux jours avant le départ, de quoi chercher la bonne formule pour rejoindre la gare de Berlin-Linchtenberg, plus à l’Est de la ville. Le départ était également postposé à 21h13 au lieu de 20h30, ce qui donnait à chacun le loisir de se nourrir avant le départ. Attention toutefois, un dimanche en fin de journée, le quartier de cette gare est complètement mort et il vaut mieux se chercher un petit restaurant dans le centre de la capitale allemande.

Quand on reprend ce train de nuit pour une seconde fois, la formule est déjà décodée et du coup, on trouve rapidement ses marques. Nous avons voyagé cette fois avec un couple de Berlinois qui profitait de cette option de voyage pour partir en Belgique et visiter Bruxelles et la côte. Le confort quelque peu spartiate des couchettes ne nous ont pas dérangés et chacun a apprécié le roulis du train qui tout compte fait nous a tous bercés. Sans doute aussi faut-il prévoir des bouchons d’oreille si on est sensible au bruit que provoque le mouvement du train plus prononcé que dans les trains modernes. Reste que le petit déjeuner, même servi avec le sourire de la jeune steward, reste particulièrement sommaire d’autant que la seconde boisson comme un jus d’orange ou un second café (du nescafé) est payante.

Qu’en est-il de l’intérêt financier de la formule ?

Un aller Bruxelles-Berlin en train de jour suppose une ou deux correspondances en Allemagne et le trajet s’étire quand même sur un minimum de 7 heures de voyage. Le coût le plus bas pour un départ programmé dans 15 jours est de 100 euros sans réservation de place. Le temps d’arriver à l’hôtel et de s’y enregistrer, la journée est passée. Une nuit pour deux personnes dans notre hôtel, le Mercure, idéalement situé sur la place Wittenberg, à côté du KaDeWe juste en face d’arrêts de bus mais aussi de la ligne U2 du métro qui permet de joindre tous les points importants de la ville d’Ouest en Est revient hors petit déjeuner à 162 euros. Bref pour un couple, nous en sommes pour le voyage aller à 362 euros. Notre voyage en train de nuit sans doute plus long, quelque 12h30, nous a coûtés 238 euros petit déjeuner inclus même s’il était minime, il avait au moins le mérite d’exister. Avec le voyage retour qui nous a permis de nous offrir 4 journées pleines dans la capitale allemande avec 3 nuits à l’hôtel et le fun garanti de deux nuits conviviales dans le train-couchette, on se sent gagnant et prêt à recommencer l’expérience. Il faut juste se sentir l’âme flexible et avoir son Gsm bien connecté (facile avec la 4G) pour être averti des changements éventuels de gares et d’horaire.

Informations

Classes et tarifs : Les voyageurs peuvent choisir entre des places assises (6 par compartiment) à partir de 49 euros par trajet, des couchettes (4 ou 6 par compartiment) à partir de 79 euros par trajet et des lits (3 par compartiment avec lavabo inclus) à partir de 109 euros le lit. Il est également possible de privatiser un compartiment (obligatoire si vous voyagez avec un chien) ou d’opter pour un compartiment woman only.

Arrêts : Bruxelles Midi, Antwerpen Centraal, Roosendaal, Rotterdam Centraal, Den Haag HS, Amsterdam Centraal, Amerfoort Centraal, Deventer, Bad Bentheim, Berlin Hauptbahnhof.

Fréquence : Depuis Bruxelles Midi, les lundi, mercredi et vendredi. Depuis Berlin Hauptbahnhof, les mardi, jeudi et dimanche.

Sachez aussi que European Sleeper prévoit de proposer une liaison vers Dresde et Prague en 2024 et vers Barcelone en 2025

Plus d’infos : www.europeansleeper.eu