Le Togo ou l’Afrique en miniature

Eric Valenne,
28-10-2022
Je suis franc, le Togo n’est pas fait pour des safaris ou vous prélasser dans un hôtel all-in sur la côte. Pourtant, la nature y est généreuse et nombre de ses plages de sable fin bordées de cocotiers feraient l’affaire près de la capitale, Lomé. Ce pays vous invite plutôt à la rencontre d’une Afrique authentique et discrète, riche en traditions séculaires, en fêtes captivantes et en patrimoine historique varié, avec des villes coloniales oubliées et des villages authentiques.

Petit bout de terre en Afrique de l’Ouest étiré entre le Bénin et le Ghana, le Togo s’ouvre au Sud sur le golfe de Guinée. Sa culture vivante est un véritable souffle venu du passé où les danses costumées et festives se mêlent aux fêtes locales hantées de traditions « vodoun » ou vaudoues. Quant aux 7,5 millions d’habitants du pays, ils sont répartis en une mosaïque d’ethnies (une quarantaine) dont les plus célèbres sont les Mina et les Ewé au Sud, les Kotokoli au Centre, les Kabyés et les Mobas au nord. De retour de ce bout du monde, voici mes impressions.

Des pêcheurs sur la côte © Eric Valenne ©

Lomé, marchés et bazar

Tout passage au Togo débute par la capitale, Lomé. Située le long de la côte et quasi sur la frontière avec le Ghana voisin, cette ville effervescente (un peu plus d’un million d’habitants) vibre en permanence d’un gentil chaos. Son grand marché quotidien d’Adawlato se trouve près de la cathédrale. C’est le moment de s’y plonger dans le brouhaha du quotidien. Il est célèbre pour ses pagnes et ses tissus. A ne pas manquer également, quelques autres marchés aux noms imprononçables et leurs colifichets, ustensiles, étoffes, tapis, alimentation, poissons, fruits de toutes les couleurs et saveurs…

© Eric Valenne ©

Le marché aux fétiches

Imposant et absolument incontournable, le marché aux fétiches d’Akodessewa. Etrange autant qu’effrayant, il propose à la vente toutes sortes d’objets liés au culte vodoun local.

Le marché Akodessewa © Eric Valenne ©

On y découvre des crânes d’animaux, des peaux de serpents, des statuettes en bois à la mine patibulaire, des fruits séchés aux formes évocatrices, des oiseaux empaillés, des onguents de toutes sortes. Bref, tout l’attirail des objets de sorcellerie. Nul doute, vous n’y achèterez rien… ou pas grand-chose !… Mais ce marché incite à en savoir un peu plus sur l’animisme et quelques aspects du culte vodoun, lequel après avoir traversé l’atlantique deviendra vaudou. Quasi religion, il se découvre et se vit dans les villages reculés du pays.

La vie quotidienne le long de la plage de Lomé © Eric Valenne ©

Mais avant cela, un petit tour s’impose par la cathédrale qui date de l’époque allemande ou vers le célèbre monument de l’Indépendance. Ou plus terre à terre, dans les ruelles du vieux Lomé colonial. Enfin, à ne pas manquer : la balade le long de l’océan, en soirée ou les week-ends, pour y observer des milliers de jeunes jouer au foot, courir en chantant, s’exercer à la lutte ou au sport, exhiber leurs muscles, se divertir… bref vivre tout simplement.

Le Lac Togo

A une quinzaine de kilomètres de Lomé et face au golfe de Guinée, ce plus grand lac du Togo est protégé par une barrière de dunes qui le sépare de l’océan. Avec une aire d’une cinquantaine de km2, il est un monde en soi.

Pêcheurs sur le lac Togo © Eric Valenne ©

Il vit au rythme des pirogues et des pêcheurs qui se déplacent et poussent leur embarcation à l’aide de longues « piques ». Cerné de dunes, il a vu naître au détour d’un de ses lagons, la cité de Togoville. Pour la découvrir ainsi que le lac, rien de tel qu’une traversée en pirogue depuis le village d’Agbodrafo, juste en face. Des scènes intemporelles se déroulent sur ses eaux : pêcheurs jetant leurs filets ou hissant les nasses pleines de crevettes, pirogues dans les reflets d’argent, couchers de soleil.

La vie autour du lacTogo © Eric Valenne ©

Mais avant la traversée, je visite la petite visite d’Agbodrafo pour y voir des témoignages comme la “Maison des Esclaves” (Woold Home) qui raconte l’histoire de la cité portugaise (Porto Seguro) située le long de la « Côte des Esclaves » qui l’a enrichie. Il est dit qu’un certain Wood, Ecossais de son état, a continué le trafic d’esclaves bien après son interdiction. Un triste lieu mais à la mémoire nécessaire, sorti de l’oubli par des passionnés, désormais patrimoine de l’UNESCO. Du côté de l’océan et au-delà des dunes, les barques des pêcheurs revenues du large sont tirées sur le sable. Les femmes viennent chercher la cargaison pour la vendre au marché… C’est le moment de photos discrètes et de rencontres véritables. Une petite pointe vers la frontière avec le Bénin à Aného me mène dans une ville coloniale oubliée mais pleine de charme.

La Maison des Escalves © Eric Valenne ©

Cinq régions captivantes…

Toute voyage au Togo, véritable Afrique en miniature, se doit de quitter la capitale et la région maritime pour se diriger vers le nord et l’une des quatre autres régions, à savoir « des plateaux », « centrale », « de la Kara » et « des Savanes ».

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La première est faite de paysages verdoyants qui accueillent l’agriculture. Ici, tout pousse facilement: igname, maïs, manioc, cultures maraichères, café et cacao… Des sentiers de découverte traversent les collines et me mènent au Pic d’Agou. Celui-ci domine le pays du haut de ses presque mille mètres (986). Il offre des vues sur le Ghana voisin. C’est le pays des grandes cascades et des forêts.

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Plus à l’est, voici Kpalimé avec son église édifiée par les colons allemands en 1913. Ses marchés d’artisans vous montrent le savoir-faire des potiers, tailleurs et sculpteurs sur bois. Non loin, Kloto est également un centre d’artisanat de sculpture sur bois et de batik.

La route qui mène vers le nord est mêlée d’arrêts photo et de rencontres, de marchés et de sourires. La région centrale compte de grandes réserves naturelles riches en petite faune africaine (zèbres, hippos, antilopes, phacochères…).

© Eric Valenne

Voici bientôt la ville de Sokodé, reconnue pour ses tissages et ses élevages de chevaux. Et puis Tchamba, dédiée à la gravure de calebasses. Au Togo, chaque coin du pays a sa petite spécialité artisanale… Comme le travail des forgerons à mains nues de Pya qui créent toutes sortes d’outils et objets en fer pour l’agriculture.

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Voici enfin Koutammakou et ses takienta ou « tatas », maisons en torchis aux allures de petites forteresses avec leurs tourelles de terre séchée. Construites par les Batammariba, elles sont également inscrites au patrimoine UNESCO…

© Eric Valenne ©

Les fêtes et les traditions du Togo…

A l’instar du Bénin voisin, le Togo a vu naître le vaudou. Et qui dit vaudou (voodoon ou vodoun) dit parfois sorcellerie et festivités sanglantes. Mais ici, rien de tout çà ! Quoi que, ici et là, à certaines cérémonies les étrangers ne sont pas conviés.

Une cérémonie dans un village © Eric Valenne ©

En ce qui concerne les fêtes dans les villages, ce sont plutôt des rassemblements bon-enfant qui réunissent à grands coups de tam-tam effrénés des cortèges de femmes dansantes et d’hommes déguisés. Tous dansent sur la terre battue des villages, devant les sages et les notables. Rien de bien terrifiant jusque-là.

Le fameux Zangbeto © Eric Valenne ©

Mais le plus intrigant est quand même la danse tournoyante des mystérieux zangbétos. Ces étranges triangles de paille qui animent les fêtes. Encadrés par des hommes qui semblent les accompagner dans leur course folle, ils semblent indomptables et indisciplinés… Ces zangbétos sont surnommés « gardiens de la nuit ». Il est dit que ces cônes de paille liée et d’osier tressé (parfois plus de deux mètres) tournoient sans la moindre présence humaine à l’intérieur… Difficilement croyable, certes. Pourtant, les nombreux arrêts, basculements et retournements semblent le prouver, question de démontrer qu’il n’y a personne à l’intérieur.

L’ambiance est assurée © Eric Valenne ©

Et ça marche… Le tout à grands cris redoublés, de chants des femmes et du son profond et lancinant des tam-tams. Et gare à celui qui essayerait de démontrer le contraire, les esprits de la nuit n’aiment pas être contrariés. La magie africaine est bien là. Chaque région a ses danses, certaines plus calmes voient les hommes danser sur des échasses (Tchebé), comme du côté d’Atakpamé ou se revêtir d’étranges costumes pour des danses effrénées.

Des visages que l’on croise © Eric Valenne ©

Quelle est la meilleure saison pour découvrir le Togo ?

Marqué au sud par une forte saison sèche (de novembre à mars), le Togo connaît deux petites saisons des pluies d’avril à juin puis de septembre à fin octobre. En juillet et en août, vous retrouvez une météo sèche, combinée à une atmosphère agréable.

Le nord du Togo est plutôt sec avec des pluies de mai à octobre.

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