Si la région est surtout connue pour son littoral sauvage et ses formidables reliefs des Picos de Europa, on ne doit pas oublier ces deux cités majeures. La première, moderne, active et commerçante, s’ouvre gracieusement sur la mer Cantabrique. La seconde cultive une histoire unique, illustrée par son patrimoine ancien et son statut de « capitale princière ». A l’heure du surtourisme, voici une destination qui coche toutes les cases, à découvrir en voiture ou en avion via désormais des vols directs de Belgique vers Oviedo.
1. Oviedo, une capitale en son ancien royaume
2. Gijón, ville marine et marchande
A peine moins peuplée que sa voisine Gijón, Oviedo est sans conteste la plus belle ville de la province. Elle doit son riche patrimoine à son passé de royaume (9ème – 10ème s.), premier territoire ibérique à avoir entrepris la Reconquista. Mais aussi à sa fonction de capitale de la « principauté des Asturies », un statut décroché après que l’héritier de la couronne de Castille puis d’Espagne ait obtenu le titre de « prince des Asturies », selon un accord datant du 14ème s.
La balade dans le centre historique est un bonheur de découverte architecturale. Au fil de calles et de plazas essentiellement piétonnes, les édifices monumentaux se succèdent : l’ancienne université du 17ème s., d’allure sévère ; le torre Vieja, romane ; le monastère bénédictin de San Pelayo, plus palais que couvent ; les édifices nobles des 17ème s. et 18ème s. de la plaza de Porlier ; l’hôtel de ville à arcades et l’église de San Isidoro, place de la Constitution ; la splendide petite place El Fontan, une cour intérieure encadrée de portiques à colonnes soutenant des maisons…
Les amateurs d’art ne manqueront pas de visiter le musée archéologique des Asturies, aménagé dans l’ancien couvent bénédictin San Vicente. Il abrite notamment des vestiges du temps où la région était un royaume. Au coin de la place de Alfonso II El Casto se tient le musée des Beaux Arts. Ce mini « Prado » déployé dans un palais du 18ème s. et une bâtisse contemporaine, abrite des œuvres d’artistes aussi connus qu’El Greco, Murillo, Zurbaran, Goya, Sorolla et même Picasso, Miró et Dalí.
Surtout, la place voit se dresser la formidable cathédrale San Salvador. Typique du gothique flamboyant, elle aligne trois portails majestueux derrière lesquels on accède à la nef et au cloître. La première présente un remarquable retable d’autel du 16ème s., en bois, et d’autres du 18ème s., baroques. Elle abrite aussi et surtout la Cámara Santa, présentant des chefs d’œuvre d’orfèvrerie des 9ème et 10ème s., un trésor inouï classé au Patrimoine mondial par l’UNESCO. Le second est remarquable par ses croisées d’ogives et la finesse de ses ouvertures.
Ville verdoyante de l’Espagne atlantique, Oviedo se pare d’une élégance commerçante illustrée par son parcours artistique et la tradition solidement installée des sidrerías. Au nord de la calle de Argüelles, le shopping est roi.
Les boutiques prennent place aux rez-de-chaussée d’édifices remarquables, le long de larges avenues piétonnières agrémentées de sculptures modernes, de fontaines et de bancs. Une centaine de statues égayent en effet les rues, un parcours arty à suivre depuis le centre historique jusqu’à cette partie moderne de la ville. « Vendeuses du Fontán » (place de Daoíz y Velarde), «Femme assise» (rue Ramón y Cajal, devant l’université), « El Diestro » (buste de torero, rue Valdes), « Culis monumentalis » (angle des rues Pelayo et Alonso de Quintanilla), « La Maternidad » (œuvre du colombien Botero, place de la Escandalera)…
Ces réalisations, souvent de grande taille, mènent jusqu’à la rue Milicias Nacionales où l’on a la surprise de découvrir une statue de… Woody Allen. Sa présence ici s’explique par l’attribution en 2002 au cinéaste new-yorkais du célèbre prix « Princesse des Asturies », remis chaque année à une personnalité du monde des arts, des sciences, du sport, de la littérature ou de la communication, au théâtre Campoamor. L’américain était par la suite devenu un familier de la région. D’autres célébrités l’ont reçu, à l’image de Norman Foster, Barbara Hendricks, Bob Dylan ou Meryl Streep, en 2023.
Autre tradition d’Oviedo : le cidre ! Comme au Pays basque espagnol, la région produit cette boisson légèrement alcoolisée à base de pommes, que l’on déguste dans des tavernes dédiées, les sidrerías.
Et s’il est une rue où il faut absolument se rendre pour le goûter, c’est bien la calle Gascona. Elle aligne quantité d’échoppes où le plaisir est autant dans le verre et l’ambiance chaleureuse que dans la façon de servir le breuvage. Levant haut la bouteille au dessus de leur tête, les serveurs remplissent les verres « au jugé », le liquide s’écoulant en un jet spectaculaire émaillé éclaboussures – elles sont recueillies dans un seau posé au sol sous le verre. Une tradition et un spectacle étonnants pour clore en beauté un séjour à Oviedo !
La plus grande cité des Asturies (275 000 habitants), plaira aux fans de villes portuaires qui savent combiner activités balnéaires et shopping. Pour bien cerner Gijón quand on y vient la première fois, direction la presqu’île de Santa Catalina. Cette protubérance naturelle, colline originelle nommée Cimadevilla, mêle ruelles et placettes populaires, scandées d’anciennes maisons de pêcheurs et de vieux bars à matelots.
Par la montée del Cerro, on accède à un parc, une ancienne zone militaire devenue lieu de balade surplombant toute la ville. Elle ouvre une vue majestueuse sur la baie de Gijón et les montagnes environnantes. On découvrira aussi deux places charmantes, Arturo Dias et plaza de la Correda, ainsi que la tour de l’Horloge et un palais du XVIème s., la Casa Natal de Jovellanos.
A l’est de la presqu’île s’étend la promenade de front de mer. Balade favorite des habitants, elle longe depuis les termes romains del Campo Valdes la longue plage de San Lorenzo, où les locaux ont l’habitude de se donner rendez-vous à l’un des escaleras (escaliers) numérotés qui dévalent vers le sable blond… Côté ouest, Gijón se déploie autour de son port de pêche et de plaisance. Face aux bateaux, la place del Marques est dominée par le remarquable palais baroque de Revillagigedo (XVIIème s.).
Son look moyenâgeux cache en réalité un ensemble baroque qui accueille régulièrement de belles expositions. A deux pas, la Plaza Mayor, encadrée de monuments aux façades ocrées, s’ouvre au sud vers un quartier de rues ultra commerçantes (calles Instutito, de la Merced, San Bernardo…), bordées d’immeubles nobles qui abritent quantité de boutiques et de cafés-restaurants.
C’est à un voyage dans l’architecture des années Franco que conduit l’excursion au « Laboral », le plus vaste complexe urbain d’Espagne aux côtés de l’Escurial, à Madrid. La bâtisse, monumentale, se tient dans les faubourgs de Gijón, posée sur un promontoire qui lui confère l’allure d’une citadelle moderne. Entrepris en 1948, cet ensemble aux dimensions gigantesques avait pour vocation d’accueillir et de former les enfants orphelins du secteur minier.
Lors de sa construction, il sera décidé d’en faire un collège et une université technique (Universidad Laboral). Dirigée alors par Franco, l’Espagne, très pauvre, pousse le pouvoir à vouloir former les plus jeunes, dans une vision éducative stricte et conservatrice. C’est au jeune architecte madrilène Luis Moya Blanco qu’est confiée la réalisation de cette forteresse scolaire, censée fonctionner en autarcie avec une ferme de 100 ha, sous la férule des Jésuites et des sœurs Clarisses.
L’entrée dans cette « cité idéale » crée un choc. L’immense place centrale (150 m de long, 50 m de large), son encadrement par des bâtiments classiques empruntant aux styles romain, grec et ottoman, l’église imposante, la haute tour (130 m !), le théâtre… : tout respire l’ordre et la mégalomanie franquistes. Délaissé dans les années 1980, le complexe a été repris par le gouvernement de la Principauté des Asturies, dans le but de lui insuffler une nouvelle vie. Depuis sa réouverture en 2007, il est devenu la «LABoral Cuidad de la Cultura», un lieu ouvert dévolu à la création artistique et industrielle, aux médias, à la formation, à la musique (conservatoire), aux expositions et à l’accueil d’évènements culturels et professionnels. L’ancien couvent des clarisses abrite ainsi le siège de la Radiotélévision de la Principauté des Asturies. Une partie des 130 000 m² du LABoral est accessible lors de visites guidées, de janvier à mi septembre.