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    Rivière Jalangi, une branche du Gange.
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En Inde, une croisière au fil du Gange

Christiane Goor,
25-03-2022

Remonter le cours du Gange – « Ma Ganga », le fleuve mère comme le surnomment les Hindous – depuis son embouchure à Kolkata (l’ancienne Calcutta) jusqu’à Murshidabad sur près de 250km avec des escales quotidiennes, rien de tel pour nous confronter à un style de vie insolite tellement éloigné de notre culture occidentale et pourtant imprégné d’une certaine douceur.

Le Gange, au rythme de l’escargot

Au départ de de Kolkata, le bateau remonte la Hooghly, un bras du Gange, sur quelque 250 kilomètres à une vitesse moyenne de 10 kilomètres à l’heure, l’occasion d’observer la vie du fleuve d’autant que sa largeur n’est pas très importante et que le capitaine choisit souvent de longer une berge ou l’autre.

Des pêcheurs sur des pirogues de fortune

Rivière Jalangi, une branche du Gange.

Dans la première partie du fleuve qui reçoit encore les effets de la marée on croise des pêcheurs qui s’attellent à lancer leurs filets, de quoi vendre leurs poissons sur les marchés locaux. Plus haut, ils disparaîtront du décor parce que le poisson se fait rare dans des eaux sans doute trop polluées. Certains pourtant ont planté de hautes perches à proximité de la rive et tendu un filet entre les bambous que le pêcheur enfonce dans la rivière avant de le relever en utilisant tout son poids sur cet improbable échafaudage de bois.

Une plaine cultivée à perte de vue

Partout jusqu’à l’horizon, ce ne sont que petits lopins de terre dont on devine qu’en période de mousson, ils peuvent être inondés et enrichis d’alluvions pour offrir une belle récolte plus tard. Des bœufs s’arcboutent en tirant derrière eux une charrue sur laquelle s’accroche le paysan pour mieux l’enfoncer encore dans la terre. Joli spectacle des dizaines d’ibis blancs qui suivent la herse pour picorer les insectes soulevés par la manœuvre. Parfois, au fil des méandres, surgissent des îlots de terre sablonneuse qui accueillent en saison sèche des rizières et une chaumière en bambou tressé. Des nappes de jonc ondoient dans la brise légère.

Insolites à nos yeux, des cheminées de briques scandent le paysage. La plupart servent à cuire des briques façonnées avec l’argile des berges du fleuve puis séchées au soleil. Malheureusement ces rives sableuses s’affaissent peu à peu, creusées par des familles entières pour arracher la terre qu’elles emmènent à la briqueterie.

Le bruissement de la vie le long de l’eau

Durant cette croisière sur le Gange, chacun est sur le pont dès les premières lueurs de l’aube, fasciné par la brume qui estompe les contours. C’est aussi l’heure du départ qui se fait en douceur et en silence. Au petit matin, les couleurs laiteuses du ciel, de l’air et de l’eau se fondent jusqu’à ce que le disque rouge du soleil surgisse et grimpe en chassant ces nappes de brume.

La même agitation dès le lever du soleil

Varanassi

Pour les riverains, c’est l’heure de gagner son champ ou son école. On entend alors le moteur hoquetant des pirogues recouvertes d’un plancher de bambous pour se transformer en bacs qui transportent la population d’une grève à l’autre. Chacun se tient debout, souvent à côté de son vélo, aucun parapet de protection n’est installé, on a l’habitude. On reconnaît aussi le bruit des pompes qui tirent l’eau du fleuve pour inonder des rizières vertes et scintillantes quand elles sont gorgées d’eau.

Les femmes donnent la couleur aux paysages

Plus en amont, le paysage se garnit d’arbres : des palmiers, des manguiers, des bananiers qui encadrent des petits villages serrés de tôle, d’adobe et recouverts de branchages, souvent perchés sur une petite butte pour se protéger des inondations de la mousson. Le fleuve se déroule tel un ruban aux couleurs mordorées creusant son chenal dans une plaine fertile, où toutes les gammes de verts dessinent un damier chatoyant sous un ciel noyé de bleu.

© saurav005 - stock.adobe.com

La plupart des maisons abrite une vaste cour que se partagent 2 ou 3 familles avec à chaque fois une petite étable ouverte sur les côtés et chapeautée d’une tôle ondulée. Chacune loge une vache et en cette saison un veau. La cuisine est généralement aménagée sous un petit abri avec un four en terre cuite alimenté par des bouses de vache séchées. Avec un peu de chance, chaque cour a sa pompe à eau et sinon on en trouve au coin des rues.

Partout les murs qui reçoivent le soleil sont tapissés de ces bouses écrasées à la main. Elles servent à la consommation des familles mais elles sont aussi vendues sur le pas de la porte. Les vaches sont précieuses non seulement pour les combustibles qu’elles donnent mais aussi pour leur lait qui sert à préparer les yogourts dont on accompagne toujours le biriani, un plat complet de riz agrémenté de morceaux de poulet et de quelques légumes sautés.

On s’étonne de découvrir des villages aussi propres, avec des rues balayées avec soin avec un plumeau en bois, et les seuils des maisons et des cuisines nettoyés avec de la bouse de vaches humidifiée considérée comme un excellent antiseptique. Evidemment les nombreux tas de déchets s’agglomèrent ensuite dans les maisons en ruines ou les terrains en friche au bord du fleuve…

Les marchés où s’échangent les fruits du labeur des familles

Scène de marché © Charles Mahaux

Dans les marchés colorés c’est au niveau du sol que se présentent les produits cultivés par les vendeurs entre des étals couverts de pyramides de légumes bien dodus : choux, carottes, aubergines, haricots, courges, concombres, tomates … et de fruits plus rares comme des énormes pommes de jacquiers. Les chèvres tenues à un pieu sont tuées au fur et à mesure de la vente pour ne pas perdre de marchandise. Les poulets blancs s’entassent dans des paniers et les poissons survivent encore dans des bassines d’eau pour maintenir leur fraîcheur.

On ne trouve guère de souvenirs dans ces contrées non touristiques. Même si à Matiari notre promenade sera scandée par le martellement des coups de marteau frappés par des artisans sur du laiton ou du cuivre, les objets fabriqués sont surtout d’utilisation courante comme des anses de seaux, des bougeoirs à encens, des petits pots à vermillon et des représentations miniatures de leurs dieux. Quant aux cigarettes roulées à la main dans des feuilles de tendu, elles n’inspirent pas confiance aux touristes amateurs de tabac…