Tout au bout de l’Europe et déjà aux confins de l’Asie, l’Arménie se situe au cœur du Caucase. Le « pays de Noé » n’a pas de côte mais un grand lac situé en altitude. L’Histoire raconte l’épopée des conquérants qui se sont succédé avec les Perses, les Romains, les Byzantins, les Turcs seldjoukides et Ottomans… Et plus récemment, la Russie soviétique. Sans oublier la tragédie du génocide et de sa diaspora qui dénombre aujourd’hui dix millions d’Arménien dans le monde tandis que l’Arménie elle-même n’en compte que trois. L’histoire mouvementée de ce petit pays a comme dernière aventure celle d’avoir été l’une des quinze républiques de la Russie soviétique. Période dont elle est fière d’avoir… tourné la page. Tandis qu’aujourd’hui, de nombreux opposants fuyant la politique de Poutine s’y trouvent désormais installés.
La ville qui compte un million d’habitants se visite facilement à pied : les édifices ne sont jamais loin. Il y a les places arborées et leurs fontaines à parcourir ainsi que l’opéra avec ses soirées dédiées notamment au grand Khatchatourian, compositeur national et sa célébrissime « Dance du Sabre ». Après cela, la balade le long des terrasses offrira tout ce que cette ville moderne et déjà européenne peut proposer : bars, restaurants, tavernes et spectacles…
Toute visite passera par la place de la République et ses édifices pastel couleur pêche dont certains datent de l’époque soviétique. Voici le Musée d’Histoire et la Galerie Nationale, le bâtiment de Gouvernement et la tour de l’Horloge où en été, les jets d’eau font leur show. Autres sites à visiter dans la capitale, la bibliothèque Matenadaran et ses millions de manuscrits. Incontournable, le mausolée « Tsitsernakaberd » évoque le génocide arménien de 1915 et son million de morts.
Avec sa pointe de granite de 44 mètres, ses douze stèles, ses arches et son incroyable musée sans oublier sa flamme éternelle, le site est régulièrement fleuri (notamment chaque 24 avril). Quelques marchés dont le plus couru, le « Vernissage », déclinent tout l’artisanat du pays depuis la symbolique du grenadier aux multiples icones en passant par les assiettes et plateaux, peintures et foulards, instruments de musique et bois ciselés…
Les Arméniens ont créé leur propre identité nationale avec une langue et un alphabet uniques qui les ont affranchis de toute autre influence. Au cœur de la capitale Erevan et depuis la rue Tamanyan, les escaliers mènent vers les hauteurs de la colonne du cinquantième anniversaire de l’Arménie soviétique. Les escalators intérieurs évitent les 572 marches et permettent de profiter du Cafesjian Center For The Arts ou « Cascade », un important centre d’art contemporain aux 1200 œuvres à découvrir. De là-haut s’admire la meilleure vue panoramique sur la ville avec les lumières qui s’allument en contrebas comme autant d’étoiles d’une galaxie trépidante aux boulevards bruyants. A l’horizon, le magnifique mont Ararat, comme veillant sur la capitale et la nation. Mais celui-ci ne se dévoile pas souvent. Situé à soixante kilomètres et aux confins de la Turquie et de l’Iran, il est un des symboles forts de l’Arménie.
La Genèse a voulu que s’y échoue l’Arche de Noé qui a fait rêver des générations d’historiens et d’aventuriers. Emblématique et envoûtant mont Ararat… Avec ses neiges éternelles qui blanchissent son sommet de 5137 mètres, il se refuse souvent à la vue et se nimbe de nuages. Paradoxalement, cette montagne que l’on dit berceau de l’Arménie est inaccessible aux Arméniens eux-mêmes car située en Turquie. Empêchés par toutes les tracasseries frontalières imposées par Ankara, les Arméniens d’aujourd’hui se contentent de l’admirer de loin. De quoi rappeler que les deux pays se tournent encore le dos sur fond de génocide. Une tragédie jamais cicatrisée ni reconnue par la Turquie.
Un goût d’aventure s’épice dès que l’on quitte Erevan avec notamment comme cap, les monastères qui font partie de la mémoire nationale et universelle (UNESCO). Si ceux-ci ne devraient pas limiter le pays au seul tourisme religieux et culturel, ils font partie de la mémoire de cette contrée du Proche-Orient. Non loin de la capitale se profile déjà le magnifique autant qu’emblématique monastère de Khor Virap.
Avec comme écrin lointain les neiges du mont Ararat à l’horizon, ce lieu témoigne de l’adoption du christianisme par ce pays, l’un des premiers à le faire. C’était en l’an 301 grâce à Grégoire l’Illuminateur, jeté ici dans un puits profond par le roi. Mais le saint y survécut miraculeusement treize ans. Au point de sauver son bourreau de la mort pour le convertir lui et tout le pays… Un monastère fut édifié autour du puits au 7ème siècle.
L’aventure continue. A 20 km d’Erevan, la cathédrale Sainte-Etchmiadzine abrite le Saint-Siège qui dirige l’Église apostolique arménienne avec son patriarche, le Catholicos de tous les Arméniens. Il s’agit d’un site religieux qui doit se visiter mais… surtout s’écouter lors des concerts chantés par les choristes les dimanche et jours de fête! Ensuite, la route permet de gagner les hauteurs encore couvertes des neiges hivernales tandis que les vallées voient les arbres fleurir. Ici et là, les vignobles s’accrochent aux reliefs et racontent leur origine ancestrale.
Quelques autres sites monastiques incontournables vous attendent encore comme celui de Geghard situé dans les collines rocheuses de l’arrière-pays. Fondé au XIIIème siècle, il cache une partie troglodyte. Les lieux sont fascinants et ressemblent comme un écho à celui de Tatev, ce nid d’aigle isolé dans les neiges printanières qui se découvre après une descente en téléphérique (le plus long au monde).
De quoi rappeler que ce pays est très montagneux, découpé de canyons et haché de rivières sauvages. Il témoigne également à l’instar de la quarantaine de monastères et d’églises du grand intérêt de ce patrimoine. Partout, l’ornementation des sanctuaires et des murs fascine avec les entrelacs et autres khatchkars (croix sculptées) qui ornent les édifices. Fondé au XIIIème siècle, il présente une partie troglodyte. Les lieux sont fascinants. Posté sur un nid d’aigle, voici Tatev. Souvent isolé dans les neiges persistantes, l’endroit ne se découvre qu’après une… descente en téléphérique le plus long au monde « Les Ailes de Tatev » (5752m)…
Détruit en 1679 par un séisme, le temple grec de Garni domine une vallée aux étranges murailles volcaniques en tuyaux d’orgue. Ce temple de style ionique a fière allure. Il semble venir droit de l’antiquité, ce qui n’est pas tout à fait vrai dans la mesure où fut reconstruit pour être à nouveau sur pied en 1976. Sur la route vers Erevan, d’autres témoignages s’admirent au cœur d’antiques vignobles aux vins originaux. Question de rappeler l’histoire plurimillénaire de cette boisson dont cette région du Caucase en est le berceau. C’est que par ici, l’accueil et la table sont très importants…
Les petits verres de vodka ou de brandy local précèderont, accompagneront ou termineront les plats locaux, mélanges d’Asie et d’Occident. Lesquels sont souvent servis avec les vins du cru. Voici les khorovats (grillades et salades), les dolmas (légumes farcis par toutes sortes de viandes), le Lahmajoun (pizza arménienne)… Sans oublier le lavash, ce pain traditionnel cuit au four, dont on peut souvent admirer la fabrication ancestrale. Mais s’il y a bien une nourriture plus spirituelle qui séduira le visiteur… c’est le plaisir d’écouter résonner l’âme et l’esprit de ce petit pays : la musique envoûtante du doudouk, ce haut-bois ancestral bercé de nostalgie qui transporte au paradis au-delà du mont Ararat.
Le duduk arménien est un instrument de musique à vent traditionnel, considéré comme l’un des symboles culturels les plus emblématiques de l’Arménie. Fabriqué en bois d’abricotier, il est doté d’une anche double qui produit un son doux, profond et mélancolique, souvent comparé à la voix humaine. Ce timbre unique lui permet d’exprimer une large gamme d’émotions, allant de la joie à la nostalgie, et de raconter des histoires imprégnées des traditions et de l’âme arméniennes. Son origine remonte à plusieurs siècles, et il est indissociable des rites, cérémonies et moments marquants de la vie arménienne. En 2005, l’UNESCO a reconnu la musique du duduk comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité, soulignant son importance dans la préservation de l’identité arménienne.
Pour écouter du duduk en Arménie, la capitale Erevan est une excellente destination. Le Centre Cafesjian pour les Arts organise régulièrement des concerts où le duduk est mis en avant. Le Théâtre national d’Opéra et de Ballet propose aussi des performances intégrant cet instrument unique. Les festivals de musique folklorique, comme ceux organisés à Dilijan ou dans la région du Lori, offrent l’opportunité d’écouter du duduk dans un cadre plus traditionnel. Enfin, dans les villages arméniens, des soirées culturelles permettent de découvrir des joueurs locaux dans un contexte authentique et chaleureux, pour une immersion complète dans la richesse sonore de cet instrument légendaire.
Découvrez ici le son du duduk : https://youtu.be/9ELJkCx3HaQ
Pratique
Quand visiter ? Au printemps (avril-juin) et en automne. L’été peut être chaud mais sympa pour les festivals et activités en plein air.
Les lettres de l’alphabet arménien semble un festival de u,n, uu, t, muuu reliés comme des macaronis ou tuyaux
Un passeport suffit. Pas de visa.
Plus d’infos
https://destination-armenie.fr/