Construit au sommet de la butte Montmartre au nord de la capitale, cet édifice de pierres blanches de style romano-byzantin, haut de 85 mètres, est à la fois un monument familier des Parisiens et une étape incontournable des touristes, avec “près de 11 millions de visiteurs chaque année“, selon son recteur, le père Stéphane Esclef.
L’histoire de ce sanctuaire dédié au Sacré cœur de Jésus, propriété de la mairie de Paris, est sensible. Sa construction est lancée trois ans après la défaite de la France face à la Prusse (1870) et deux ans après la Commune (mars à mai 1871), épisode insurrectionnel sanglant qui a débuté par la prise de canons à l’emplacement de l’édifice. En 1873, l’Assemblée nationale, dominée par les conservateurs, déclare la basilique d’utilité publique.
“L’édifice, dès le départ, porte l’opinion d’une frange politiquement très clivante, les ultra-catholiques” qui veulent “mater un quartier jugé insurrectionnel du nord-est parisien“, mais aussi “expier la Commune de 1871 ainsi que toutes les révolutions depuis 1789“, explique Eric Fournier, maître de conférences à l’Université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Depuis, il est associé à l'”ordre moral” répressif de l’époque.
Le monument, qui a mis très longtemps à être construit (de 1875 à 1923), a régulièrement été l’objet de controverses entre politiques et entre historiens, jusqu’à récemment lors d’un court débat au Conseil de Paris. “L’aboutissement de cette répression, c’est l’édification de cet odieux édifice religieux sur ces morts que l’on estime à près de 30.000“, a déclaré l’élue communiste Raphaëlle Primet pour qui “ce classement reste un affront à la mémoire des communards“.
“Même si l’histoire a été mouvementée, on ne peut pas rester avec une vision passéiste des choses, il faut avancer et voir que ce lieu maintenant est emblématique“, souligne le père Stéphane Esclef. Le Sacré-Cœur devrait d’ailleurs profiter de quelques aménagements, comme d’un accès aux personnes à mobilité réduite, une ouverture de sa crypte aux visiteurs et la rénovation de son orgue.